La prestation de l'équipe de france féminine U16 figure certainement, avec celle de leurs homologues masculins, parmi les plus belles de ces dernières années. Tous les ingrédients sont réunis pour fournir à l'équipe de France de Paris 2024 une équipe talentueuse et compétitive : le skill et le QI Basket de Marine Fauthoux, le shooting de Zoé Wadoux, la dimension athlétique de Anaia Hoard, la défense de Kendra Chéry, et le rebond et le jeu dos au panier d'Iliana Rupert.

J'aimerais avoir le temps de parler ensuite de la rotation, parce que quasiment toutes les joueuses de ce roster ont un gros potentiel (notamment Binta Dramé qui m'a beaucoup plu, ainsi que Pardon, Salaun, Hamaoui, mais pas seulement...). Elles méritent toutes qu'on parle d'elles, mais j'ai du faire des choix. Je m'en excuse d'avance.

Étant toutes talentueuses, je ne les classe pas par leur niveau en tant que prospect, mais par position.

Marine Fauthoux

PG, 16 ans, 1m75, CFBB

Marine Fauthoux est une joueuse exceptionnelle dont on va parler pendant longtemps. Voilà pour l'introduction.

Blessée, elle n'a pas pris part aux matchs de poule. On l'a clairement senti pendant la phase éliminatoire : ses débuts de matchs n'était pas très nets, les shoots souvent trop courts et les passes imprécises. A l'image de son équipe, elle mettait du temps à se mettre dans le bain, mais redressait assez vite la barre (pendant les débuts de 2è QT en général). Il faut par conséquent, il me semble, revoir ses pourcentage à la hausse. Son shoot à 3 points, dont la forme est très bonne et très peu "forcée", comme c'est le cas pour beaucoup de jeunes filles, parait valoir mieux qu'un 25%, et ses 3 pertes de balle par match serait certainement divisés par deux si elle était mieux rentré dans ses matchs. Pendant la campagne U16 de 2016, Marine tournait à 46% à 3 point (!!!) et seulement 1.7 turnovers pour 3.3 passes.

Dotée d'un très bon handle, et d'une palette de move qui doit faire pâlir d'envie bien des hommes, elle est à l'aise sur tout le terrain. Elle peut shooter de vraiment n'importe où et n'hésites pas à aller driver. Elle n'a pas le jeu de passe le plus simple, mais elle va souvent trouver des solutions là où les autres n'auraient même pas songé à y penser. Elle est particulièrement douée en drive'n dish.

Défensivement, sa taille, son QI basket, et sa bonne latéralité lui permettent d'être efficace. Ajoutez-y la volonté de bien défendre, et vous avez là une vraie joueuse "two-ways".

Marine Fauthoux doit travailler ses entames, donc sa préparation et sa concentration, et doit fiabiliser son shoot, mais elle a des années d'avance sur son programme. Sur le terrain, on aurait quasiment dit une joueuse professionnelle. Si elle continue à progresser... je n'ose même pas imaginer ce que cela pourra donner.

Zoé Wadoux

SG, 16 ans, 1m76, CFBB

25 trois-points rentrés par match en 63 tentatives. Soit quasiment 40% de réussite. En enlevant sa prestation médiocre face à l'Italie (en seconde mi-temps surtout pendant laquelle elle a du shooter à 1/9, quelque chose comme ça), ce ferait 21 tirs rentrés en 48 tentatives.

Il y a du Ray Allen chez Zoé Wadoux, qui possède certainement le shoot le plus pur vu chez les féminines cet été. A 16 ans... voilà voilà ! Son tir est déclenché haut, avec un joli geste du poignet, et part surtout incroyablement vite pour une joueuse de cet âge. Là encore, un shoot digne d'une pro. Mais Zoé Wadoux n'est pas qu'une shooteuse, elle à l'aise avec la balle en main et peut distribuer en tant que second handler - elle n'a pas encore la vision de jeu de Fauthoux -.

Si elle drive peu (souvent utilisée en spot-up, et son shoot est tellement rapide à partir qu'elle n'a pas besoin de se transformer en "triple menace"), elle a montré en de rares occasions qu'elle en était capable. Voilà une addition à son jeu qui pourrait être intéressante à l'avenir, surtout que son handle est déjà bon.

Elle est aussi solide défensivement. Tout comme sa collègue de la ligne arrière, elle montre une certaine envie de bien faire, une certaine hargne parfois même, et si elle est pour le coup un poil petite pour sa position, elle peut néanmoins continuer à grandir.

Si Marine semble être notre playmakeuse du futur, Zoé sera notre scoreuse du futur. Tony & Nando en quelque sorte, ou Steph & Klay... (oui, oui, je suis dithyrambique mais il y a de quoi).

Anaia Hoard

SG/SF, 16 ans, 1m81, CFBB

Anaia Hoard est la soeur de Jaylen Hoard, notre prospect U18 qui martyrise les jeunes américains en highschool et qui devrait rejoindre la NCAA pour la saison 2018/2019. Parmi les 5 joueuses présentées aujourd'hui, n'est pas la plus grande (Rupert), la plus skillée (Fauthoux), ni la meilleur en défense (Chéry), ni la meilleur shooteuse (Wadoux). Mais elle est une jolie combinaison de tout ceci. Si son frère est un go-to scoreur patenté, Anaia est pour le moment un couteau-suisse que cette équipe de France à très bien su utiliser.

Athlétiquement, elle fait parti du "haut du panier", voire même plus (oui, cela ne veut rien dire, mais vous comprenez l'idée), et elle possède une bonne taille pour le poste 2, et Jaylen faisant 2m04, on se dit qu'elle peut encore grandir.

Le shoot est ok, même s'il ne rentre pas forcément à tous les coups (1/4 à 3 points, elle préfère souvent les shoots à 5m), le handle est bon, mais elle a tendance à exploser dans la raquette et à balancer un peu le ballon parfois, elle fait bien tourner le jeu (1.1 passes) mais elle se précipite parfois (1.7 turnovers).

En bref, il y a encore pas mal de travail chez Anaia Hoard, le puzzle n'est pas encore complet, mais avec son profil athlétique, son pedigree, et sur ce qu'elle montre en défense, il y a fort à parier qu'elle saura trouver les dernières pièces qui manquent à son jeu. Il faudra être plus patient avec cette joueuse qu'avec Fauthoux, Wadoux, ou Rupert, mais elle peut, selon moi, devenir un très très grande à l'avenir.

Kendra Chéry

SG/SF/PF, 16 ans, 1m88, CFBB

Kendra Chéry, c'est, selon moi, le plus gros potentiel de cette équipe. Listée comme une ailière forte selon le site de la FIBA, j'ai la certitude qu'elle pourra à l'avenir évoluer des postes 2 à 4, ce qu'elle fait déjà... en défense.

La défense de Kendra Chéry est hors norme. Elle est assez grande, longue, et puissante pour défendre à l'intérieur avec une très belle efficacité (1.4 contres par match). Mais elle est aussi suffisamment athlétique pour bien défendre sur le poste 3. Et enfin, elle descend très très bas sur ses appuis, possède une latéralité exceptionnelle pour sa taille et sait donc aussi défendre sur les postes 1 et 2 avec une belle efficacité (2.9 interceptions !!!). Quel cauchemar elle a été pour nos adversaires, switchant sur les picks et défandant sur tout le monde !

Kendra Chéry, par ses capacités défensives, est un joueuse très, très rare. Et si la défense est là, ce n'est pas que grâce à ses qualités physiques, on voit vraiment son envie d'éteindre son adversaire, quelqu'il soit. En étudiant les stats de ce championnat a posteriori, nous avons vu son impact dans le plus/minus. Par match, elle possède un +/- de +20.7 !!!

En comparaison, Fauthoux est à +6.3 (pas présente pendant les poules, donc plus faible que les autres), Wadoux à +14, Hoard à +7.7, et Rupert à +15.9. Autant dire qu'elle était certainement l'élément le plus important de cette équipe, même si pas forcément le plus hypé.

Pour ne rien gâcher, son jeu offensif est loin d'être raw. Elle rentre peu de 3 points, mais le shoot est vraiment là, avec une belle forme, le handle n'est pas assez resserré encore, mais elle a un premier pas très rapide et ses longs bras lui permettent de s'imposer dans la raquette. C'est aussi une rebondeuse très solide, notamment en attaque.

La progression par rapport à l'été 2016, notamment au niveau du shooting, laisse présager du meilleur. A noter qu'elle a pris 4 centimètres entre ses 2 campagnes U16 selon la FIBA. Continuera-t'elle à grandir ?

Kendra Chéry est très clairement ma chouchoute de cette campagne U16, mais objectivement, son potentiel est incroyable. Si elle travaille, continue à progresser et à montrer la même hargne à l'entraînement qu'elle en montre en défense... sky is the limit...

Iliana Rupert

C, 16ans, 1m93, CFBB

Fille du regretté Thierry Rupert (que de pedigree dans cette équipe !), Iliana détonne dans le paysage du basket féminin. Terriblement grande et puissante, elle a tout du pivot à l'ancienne, et elle aussi semble très en avance sur son âge en terme de basket. On dit souvent que les pivots mettent plus de temps à se développer. Pour Rupert, il y a déjà une bonne palette de skills à disposition. Légère sur ses pieds (tout du moins en attaque), elle a un très bon toucher, ce qui fait d'elle à la fois une redoutable scoreuse sur ses rebonds offensifs, mais aussi une cible facile pour le jeu intérieur.

Elle possède aussi un excellent shoot, qu'elle montre avec parcimonie (3/6 à 3 points pendant la campagne 2016, 1/4 cette année). Bien qu'elle montre peu d'élévation, sa longueur lui offre des shoots faciles et devrait lui permettre d'être une vraie menace en pick'n pop.

Là ou elle devrait peut-être plus travailler, c'est sur sa vitesse, ce qui lui permettrait alors de devenir plus dangereuse en pick'n roll. Elle serait alors quasi impossible à défendre.

Le bas blesse plus en défense, en particulier dans les débuts de match, pendant lesquels sont manque de latéralité associé à une certaine apathie l'ont transformée en vrai emmental (pour votre culture personnelle, le gruyère n'a pas de trous). Iliana Rupert n'est pas armée physiquement pour défendre au périmètre face à des joueuses plus rapide, mais elle se doit d'être une tour de contrôle défensive grâce à sa belle envergure. Se reprenant souvent en cours de match, elle a montré qu'elle pouvait remplir ce rôle (1.7 contres par match), il lui faudrait simplement le montrer sur toute la durée d'un match.

Iliana Rupert doit travailler son élasticité musculaire, travailler sur sa concentration fluctuante, mais là encore, si la progression continue, elle deviendra vite un élément indispensable à nos équipes de France.

 

Crédits Photos : FIBA