Caitlin Clark vient tout juste d'avoir 20 ans. Caitlin Clark vient tout juste de planter 46 points en NCAAW, face à une des meilleures équipes du pays (Michigan), en y ajoutant 10 passes décisives, performance inédite au cours des 10 dernières années de basketball à l'exception de Kevin Durant lors des Playoffs NBA 2021... Caitlin Clark est la joueuse qui se rapproche le plus d'un Stephen Curry du premier sexe. Caitlin Clark est une révolution, et contrairement à l'autre, celle-ci est bien télévisée. 

 

Souvent, les comparaisons sont fainéantes dans le sport. Ainsi, celle de notre exceptionnelle Marine Johannès avec l'immense Stephen Curry. Oui, Marine est créative, oui elle peut tirer en sortie de dribble rapidement, de loin. Stylistiquement pourtant, la comparaison s'arrête là : les similitudes de capacité au tir, de range, de handle, ne sont pas les mêmes, tout comme la régularité. Marine Johannès est une excellente joueuse et n'a pas besoin de se voir comparée à Stephen Curry, l'homme d'une Révolution stylistique, visuelle, globale du basketball américain et - comme quand on parle de balle orange les USA influencent le monde - mondiale.

Alors pourquoi vouloir faire de Caitlin Clark la Stephen Curry féminine. Voyez plutôt.

We just know you wanted to see a reel of @CaitlinClark22 three-pointers.????

CC: @IowaWBB pic.twitter.com/6nzKJM1LoN

— Iowa On BTN (@IowaOnBTN) February 7, 2022

 

 

 

Les similitudes sont TROUBLANTES. Elle dégaine quasiment aussi vite que Stephen, le jeu de jambes est d'une fluidité extraordinaire et donne cette sensation que le tir n'est jamais forcé, jamais saccadé, même à 10 mètres quand il faut de la force. Sa capacité à se repérer dans l'espace est extraordinaire, son oeil lui dit en quelques millièmes de secondes où elle se trouve, son corps s'ajuste, ses pieds se placent, son bras dégaine. Contrairement à certains shooteurs "de rythme", Clark n'est pas moins à l'aise en catch and shoot qu'en pull up, n'a pas de difficultés lorsque le ballon vient de la droite ou de la gauche (en étudiant attentivement ou pourrait voir une différence de réussite, comme pour tout le monde, mais le rythme et la fluidité ne sont pas altérés, les tirs manqués sont rarement catastrophiques). 

Pour continuer dans le stylistique, elle a quasiment tout le temps la tête levée, elle est excellente dans les petits espaces, elle possède une vision de jeu au-dessus de la moyenne, elle est altruiste en sachant laisser aller son individualisme, elle profite de la menace de son tir pour terminer au cercle avec efficacité (+50% à 2 points). En regardant Caitlin Clark évoluer en NCAAW, on a l'impression de voir une version premium du jeune Stephen Curry de Davidson. Sauf qu'elle est déjà solide, 1m83, bien gainée : elle ne sera jamais un mastodonte mais on devine un physique pour durer au plus hait niveau, là où Curry présentait des signes de fragilité lors de ses jeunes années. Bref, si l'efficacité au tir lointain, cette saison, est en berne (30% seulement contre 42% en année freshman), tout le reste laisse penser qu'elle est la joueuse la plus à même de révolutionner le basket féminin, comme Curry l'a fait avec le masculin. Reste la question psychologique, celle de l'adaptation : Caitlin Clark a choisi de rester jouer près de chez elle, en Iowa (elle est née à Des Moines, la capitale de l'Etat), elle n'a pas encore été confrontée à un environnement "difficile". 

Caitlin en stats

Pourquoi parle-t-on de joueuse exceptionnelle ? Ce n'est pas seulement dans le style, l'impression visuelle : les chiffres sont là pour appuyer l'oeil. Au mois de janvier, Clark est devenue la première joueuse aux Etats-Unis (NCAAW et WNBA confondues, je ne sais pas cela a déjà été fait en Europe) à enchaîner deux triple-double en inscrivant plus de 30 points. Seuls six joueurs NBA y sont parvenus au XXI siècle mais les matchs ne durent que 40 minutes en NCAA. Après avoir scoré 60 points en un seul match au lycée, Clark a choisi Iowa, car elle considère que la coach, la grande Lisa Bluder, s'adapte à ses joueuses, dans un championnat où c'est bien souvent l'inverse qui arrive. Lors de sa saison freshman, elle a shooté à 42% à trois points sur 9 tentatives par match, une folie. Cette année, le personnel autour d'elle est moins performant, elle doit porter l'équipe et prendre une part encore plus lourde à la création. Sa réussite à trois opints a drastiquement baissé (30,2%), mais tout le reste progresse, un bon signe : elle prend plus de rebonds, fait plus de passes décisives, perd moins de ballons, shoote mieux aux lancers-francs et en provoque plus.

Ses stats 21-22, en 35 minutes de jeu : 27,4 points de moyenne, 57% à deux points, 30% à trois points, 89% aux LF / 8,2 rebonds / 8,2 passes décisives / 1,3 interception / 0,5 contre

 

Ses perfs cette saison

- le 6 février @ Michigan : 46 / 4 / 10 à 14/29

- le 31 janvier vs Ohio State : 43 / 4 / 7 à 16/28

- le 25 janvier vs Penn State : 20 / 7 & 17 ast, record de la conférence

- le 20 janvier @ Minnesota : 35 / 13 / 11 à 14/21

- le 16 janvier vs Nebraska : 31 / 10 / 10 & 4 steals à 9/22

- le 2 janvier vs Evansville : 44 / 5 / 8 à 18/26

+ trois autres triple-double à moins de 30 points (nul)

Depuis le 20 janvier (7 matchs), Caitlin shoote à 27/60 à trois points. Elle n'est que sophomore, c'est-à-dire en deuxième année. En 2019, au FIBA U19, remporté par les Etats-Unis, elle était pourtant sur le banc, elle n'a pas brillé, éclipsée par deux autres étoiles de la génération précédente (2001) : Paige Bueckers, elle aussi sniper (45% de loin en deux saisons avec UConn) évoluant dans une équipe plus habituée aux spotlights (mais sans le range ou le swagger de Clark) et Hailey Van Lith (Louisville, 34 pts à 13/16 la semaine dernière). C'est aussi en ce sens que Clark est Curry-esque : elle tente de guider Iowa, université peu habituée au succès, vers les sommets. Chaque possession impliquant la joueuse démontre l'évidence de son importance dans l'équipe : la menace de son tir crée des espaces pour les autres, son altruisme exploite ces espaces. 

Caitlin Clark est déjà un must see à chaque fois qu'elle met les pieds sur un parquet, il lui reste encore quelque matchs avant une March Madness qui pourrait s'annoncer dantesque.