Si vous êtes un amateur de basketball français, vous avez forcément déjà entendu parler du Centre Fédéral de Basketball (CFBB ou PFBB), anciennement connu sous le nom générique de l'INSEP. La structure, développée et gérée par la FFBB, acceuille tous les ans les meilleures jeunes joueurs de 16 ans pour un cursus de 3 ans au sein d'un pôle d'excellence. Les séléctionnés ont passé toutes les étapes de la détection fédérale  : séléctions départementales en U13, CIZ au Temple sur Lot et Camp National. Partons à la rencontre de la nouvelle génération.

Si vous êtes fan d'une équipe évoluant dans les divisions supérieures françaises vous avez forcément dans votre effectif un de ses anciens pensionnaires. Parmis ses plus récents alumni on retrouve Théo Malédon, Ousmane Dieng, Juhann Begarin, Ismael Kamagate, Timothée Crusol... Une fois intégré à la structure les pôlistes évoluent soit en U18 France avec l'équipe U16, soit en National Masculine 1 avec l'équipe U18. Une tâche ardue pour des jeunes qui n'ont pas encore fini de se développer physiquement que de se frotter deux fois par semaine, dans la configuration actuelle du championnat NM1, à des joueurs ayant fini leur cursus Espoirs/NCAA ou à des professionnels aguéris. Cela se reflète directement dans l'historique de résultats de l'équipe : il n'est pas loin le temps où les jeunes pousses finissaient leur saison sans une victoire, où que l'exploit d'arracher une victoire annuelle contre les équipes de bas de tableau soit relayée par les médias spécialisés. Evan Fournier l'avouait lui même, passer d'une domination totale en club en équipe de jeune à des défaites quasi-systématique lui pesait énormément lors de son passage à l'Avenue du Tremblay.

Mais la tendance semble légérement changer ses dernières temps. Déjà l'année dernière, avec l'appui de Victor Wembanyama, le Centre Fédéral avait engrangé 2 victoires dans une saison tronquée. Mais cette année, en 3 mois de compétition les troupes de Lamine Kébé ont déjà engrangé 3 victoires. Coup sur coup face à Avignon après prolongation puis à Besançon, deux équipes ayant encore du mal à lancer leurs saison, puis début novembre face à Boulogne-sur-Mer actuel 5ème de la poule B. Kebé, remplaçant de Jean-Aimé Toupane, peut compter sur de très fortes individualités, citons Rayan Rupert, Noah Penda, Aurele Brena-Chemille, Melvin Ajinça, Mael Hamon-Crespin, tous vu en Equipe de France jeune cette été, à l'exception de Penda.

Cet échantillon de trois matchs remportés (en plus du match contre Orchie, lui aussi s'étant terminé en prolongation et perdu de seulement 2 points) est intéressant de par le turnover qu'a rencontré l'équipe sur la période. On aura pu observer le début de saison avec l'ensemble des joueurs majeurs présents, puis les absences de Rupert et Ajinça ont permi de redistribuer le temps de jeu ainsi que les tickets shoot et les rôles des joueurs de rotation. On a vu le duo d'arrière/ailier avoir souvent le ballon dans les mains et organiser le jeu contre Orchies, puis Brena-Chemille prendre en main le scoring arrière lors du doublé de victoires, bien accompagné par Bouzidi et Fibleuil comme porteurs de balles/organiseurs du jeu. Contre Avignon on a aussi pu voir Wilson Jacques et Simon Correa apporter de la présence intérieur "brute" lorsqu'Hamon était gêné par les fautes. Prenons donc le temps de revenir sur les profils les plus prometteurs de cette génération 2004/2005.

Noah Penda (05) - F

Stats : 12 matchs, 14 PTS dont 57% à 2 points et 48%FG, 7.4 RBD (3.2 off), 2.4 AST, 2.5 STL (!) et 2.8 TOV en 33 minutes de moyenne.

Avant de parler physique ou basketball, revenons sur l'aspect mental qui peut faire de Noah Penda un prospect de haut niveau : à 16 ans celui-ci est le fer de lance d'une équipe évoluant en NM1, n'ayant pas peur de se mesurer à des hommes plus mures physiquement que lui (quoi que...) et commettant peu d'erreurs quand on prend on compte la pression que peut causer son ratio temps de jeu/âge. 16 ans... Comme on l'a déjà souligné,  l'ancien Levalloisiens est sérieusement avancé physiquement pour son âge : annoncé à 1.96 m, 2 cm de plus qu'à son entrée au CFBB, on lui donne vers les 90 kg à vu d'oeil, avec déjà une masse musculaire importante. Parmis les suiveurs du CFBB on note que cette maturité physique est peut être ce qui fait que Noah n'est pas évalué comme le talent qu'il peut devenir, il ne colle pas au stéréotype du prospect skinny qui garni les bancs de l'INSEP (pensez à Maledon avant son arrivé à l'ASVEL, Fournier, même Hayes à Cholet). Sa première qualité est donc son physique, mais pas seulement pour enfoncer les adversaires plus petits que lui, non, Penda possède une excellente mobilité latérale et on le voit à plusieurs reprises défendre sur les meneurs adverses et les empêcher de le dépasser. Deuxièment, il montre déjà la compréhension de jeu d'un joueur expérimenté ce qui lui permet d'être efficace à la fois au scoring et en défense off-ball. En attaque, il occupe très bien le dunkeur spot et ne s'avance qu'une fois que son vis à vis est venu en aide, pour finir tranquillement avec la planche. Il effectue très bien les coupes en back door ou sur pin down pour se faire servir par Fibleuil, Brena ou Rupert. En défense, tout comme les autres joueurs cadre, il a une excellente vision des lignes de passe et intercepte le ballon en moyenne 2.5 fois par match, pour souvent conclure rapidement en transition. Dernière émanation de son QI basket, Penda n'est pas un intérieur au sens traditionnel du joueur qui évolue essentiellement dans la raquette et pourtant celui tourne à 3.2(!) rebonds offensifs par matchs. Rajoutez à cela une qualité évidente de scoreur, en attestent ses 1.3 PPS (Point Per Shot) et 56%TS (True Shooting) et un ball handling tout à fait acceptable pour un joueur qui porte au final assez peu le ballon.

Pour ce qui est des côtés négatifs du jeu de Penda on devra être vraiment pointilleux tellement le positif est présent. On notera une capacité à se créer un shoot ouvert mid-range encore à développer quand on compare à sa réussite plus près du panier sur floater. Le shoot à trois point n'est pas encore élite, essentiellement en catch & shoot, mais la mécanique et l'arc du tir sont très intéressants. On peut le voir dunker très férocement mais on note un petit manque d'explosivité sur saut arrêté, notamment sur les vis à vis face aux intérieurs et les tentatives de blocks proche du cercle où il les gène assez peu. Finalement, le natif de Seine-Saint-Denis s'est rendu coupable de pertes de balles décisives dans les derniers moments des matchs serrés, souvent en tentant de longues passes trop dures. Avec 2.8 pertes de balles le jeune ailier pourra encore améliorer son impact et sa côte s'il peut devenir plus précontionneux. 16 ans...

Mael Hamon-Crespin (04) - PF/C

Stats : 12 matchs, 9.8 PTS à 37.7%, 6.3 RBD, 1.3 AST et 2 STL en 34 minutes de moyenne

Vu cet été en sélection U18 au côté de Houinsou et Doualla, Mael Hamon-Crespin est un des leaders du groupe U18 du PFBB au côté de Rayan Rupert dans l'attitude, plus que dans les statistiques. Le jeune lorrain bénéficie apparemment d'une bonne côte de l'autre côté de l'Atlantique et il prouve son importance au sein du groupe de coach Kebé avec la deuxième évaluation de l'équipe en n'étant souvent que la 3 ou 4ème option offensive. Ce que Hamon-Crespin vend, c'est son combo gabarit/mobilité qui colle aux tendances actuelles dans le monde du basket, un peu comme Batcho en son temps, en moins skillé sur le jeu au poste. Il apporte du spacing, il évolue beaucoup derrière la ligne à trois points où il pose des écrans puis pop pour se proposer en shooteur de catch & shoot, il prend plus d'un tiers de ses shoots de loin. Mais la réussite n'est pas encore là, on voit une mécanique correcte et un match à 3-5 de loin, mais globalement le pourcentage (25%) est trop bas pour un joueur qui prend autant de shoots de loin sans être un shooteur primaire. On le voit le plus souvent en tant que poseur d'écran, même si ceux-ci manquent encore d'impact pour un joueur de son gabarit (2.06m). Afin de devenir un vrai poste 4 moderne, on espère le voir prendre en muscle et travailler le jeu dos au panier afin de pouvoir punir les joueurs aussi bien sous le cercle qu'au loin, le reste viendra à n'en pas douter.

Melvin Ajinça (04) - SF

7 matchs, 14.3 PTS à 36.4% dont 20,2% à 3 points, 3.1 RBD, 1.9 AST, 2.3 STL en 31 minutes de moyenne

On avait aussi déjà aperçu Melvin Ajinça en U18 cet été, lui qui évolue avec les U18 du PFBB depuis 2 ans déjà et je dois avouer qu'il avait été un peu décevant à mes yeux. De par son nom, il est le neveu d'Alexis qui a évolué en NBA pendant 9 ans, mais aussi ses prédispositions physiques mes attentes étaient assez hautes. J'en entendait autant parlé que son coéquipier Rayan Rupert et l'attendait comme un leader des deux côtés du terrain. Commençons par le positif, voir très positif : son physique et l'avantage défensif que celui-ci lui confére. Annoncé à 2.01 m, le francilien est aussi dôté de grands bras qui lui permettent de défendre la plupart des extérieurs et les postes 4 loin du cercle. Sur l'aspect défensif il faut l'avouer, il est peut être déjà élite dans sa génération. On le voit plusieurs fois par match faire les bonnes lectures, intercepté les passes transversales et lancer les contre attaques du CFBB. Il est aussi efficace pour gêner les shooteurs adverses et possède une bonne mobilité latérale, ce qui lui permet de gêner efficacement les porteurs de balle qui se présentent face à lui. Il possède aussi une superbe capacité à se séparer de son défenseur balle en main, sur side step ou step back se créant facilement un mètre d'écart avant de shooter. Mais c'est là que les reproches commencent, la mécanique est vraiment étrange et semble même souvent changer. L'arc est assez haut mais il se passe quelque chose lors de la release qui fait que son shoot longue distance est extrèmement hasardeux. Avec 7.9 tentatives sur ses 7 matchs disputés, autant que ses tentatives à l'intérieur de l'arc à 3 points, et seulement 20.2% de réussite c'est un yellow flag au mieux, voir un drapeau rouge. Il se trouve actuellement dans le bas des classement du championnat avec 0.9 PPS pour un joueur touchant beaucoup de ballons. Car en plus d'avoir une grosse propention à tirer Ajinça peut avoir tendance à monopoliser le ballon en dribblant et à avoir peu de capacité à créer pour les autres. Cela ne se traduit pas forcément par des pertes de balle, il est seulement à 1.6 TOV en 31 minutes, mais par des tirs très compliqués à la fin des 24 secondes. On peut se questionner sur la vision et compréhension du jeu, le jeune homme ayant été habitué à dominer physiquement. Je ne saurais pas encore dire si il lui sera possible d'exister au niveau professionnel à sa sortie du Pôle France, son apport offensif étant vraiment très faible, mais il est certain que l'upside défensif et les flash de pull up à 3 points et sur long 2 peuvent pousser une équipe de Pro B ou une université à investir sur lui sur les trois ou quatre années à venir.