Quand on parle d'un prospect on utilise souvent des termes techniques, on fouille, on dissèque, on farfouille les chiffres, les stats, on coche des cases, on raye des noms, on range par groupe : on sort de l'humain. Quand on parle de Jason Preston, on parle d'abord de lui, de son parcours, de son histoire. Jason Preston a été élevé par une mère célibataire, elle est morte d'un cancer quand il avait quinze ans. Alors, il a vécu avec un ami, il jouait déjà au basketball, au lycée, lors de sa dernière année, il inscrivait deux points de moyenne. Lors des tournois de fin d'année en AAU (où les joueurs se regroupent pour former des équipes indépendantes de tout lycée ou d'une fac'), moment clé du recrutement, il parvient à intégrer une équipe, par hasard. Il joue bien, il relève la tête, il s'inscrit dans une académie de basketball, il réalise sa propre mixtape. Quelques semaines plus tard, une offre tombe, Ohio, université de conférence moyenne. Dès la première année, il devient rapidement titulaire, mais score peu. Sophomore, il porte le ballon, il est indispensable, score 17 points de moyenne, plus six rebonds et sept passes décisives. Il réédite les mêmes stats ou presque, avec de l'efficacité supplémentaire, cette saison. Le voyage a débuté en dernière année de lycée, il mesurait à peine 1m80, pour 64kg. Désormais, l'ardoise est à 1m93 en chaussures, presque 85kg, à quelques minutes peut-être de la NBA.

Ses forces, au-delà de son parcours, sont dans la tête de Preston. À quelques exceptions près il est au courant de la position de quasiment tous les joueurs sur le terrain. De fait, il peut anticiper et jouer le chef-d'orchestre, offensivement (34% AST en carrière), être en place au bon endroit défensivement et utiliser son envergure (2m04). Lorsqu'il doit improviser, il le fait en connaissance de son environnement. Preston est également un bon shooteur, surtout en catch and shoot. Il a réussi à maintenir quasiment la même réussite en 3e année qu'en 2e, alors qu'il était beaucoup plus surveillé par les défenses adverses. Il shoote vite, haut, droit, sait varier ses appuis (pied droit ou gauche d'abord, hop step), il a du toucher, en témoignent ses floaters. Jason Preston est grand, pour son poste, ça lui permet de peser au rebond, de prendre avantage de son corps. Toutes les raisons précédentes additionnées font qu'il est un excellent joueur de pick'n roll, il l'a démontré face à certains des meilleurs défenseurs de la NCAA cette saison (comme Dosunmu, d'Illinois). Sa dexterité est fonctionnelle, son jeu de passe aussi, sans être flamboyant, il sait ne pas prendre de risques démesurés.

Ses faiblesses, malgré sa poussée de croissance, sont majoritairement physiques. Preston n'est pas un athlète et s'il est rarement en retard défensivement, quand il l'est, il a énormément de mal à se rattraper. En NBA il sera d'autant plus exposé sur cette moitié de terrain. Offensivement, rien n'est suffisamment extraordinaire pour se permettre de le classer comme un spécialiste, si ce n'est le jeu sur pick'n roll, mais son handle manque de fluidité, de même que son jeu de passe, notamment main gauche. Aura-t-il des responsabilités de porteur de ballon en NBA ? Pas certain. Alors, à quoi sert-il ? Jason Preston n'a pas le physique pour faire la différence en un contre un, pas le tir en sortie de dribble ou le jeu de passe fabuleux pour être un joueur de pick'n roll extraordinaire ET il sera forcément moyen, au mieux du mieux, en défense. En clair, l'équipe qui le drafte doit le faire jouer loin du ballon, en second unit, espérer qu'il continue à développer son tir, son dribble et que la réussite suspecte aux lancers-francs n'est pas indicatrice de danger (70% en carrière).

Sa carte de visite, c'est son cerveau, sa progression tardive. Il peut devenir un role player fonctionnel car il a la taille pour, mais cela demandera du travail, alors qu'il a déjà 22 ans.