Avant la draft NBA, qui se tiendra le 29 juillet prochain, il y a des passages obligés. Obligés - sauf Covid - comme on dit maintenant, puisqu'en 2020 les traditions se sont un peu perdues en route et les évaluateurs ont eu un peu plus de mal que d'habitude à y voir clair. Pourquoi ? En partie parce qu'il n'y avait pas eu de NBA Combine "réel" : un lieu où plusieurs dizaines de candidats, pré sélectionnés avec soin, sont invités pour des mensurations physiques, athlétiques, des exercices de tir et des oppositions (2 vs 2 jusqu'à 5 vs 5). En 2021, le Combine se tenait à Chicago, et comme d'habitude il a réservé son lot de petites surprises. Quels prospects ont marqué des points, quels autres ont fait baisser leur cote ? Réponse en quatre catégories.

 

Les grands gagnants

 

Nah'Shon Hyland (VCU)

Les initiés le connaissaient déjà, les autres ont appris à le connaître. Nah'Shon, surnommé "Bones", Hyland n'a pas vraiment surpris par ses mensurations, d'ailleurs il es assez petit (1m92 en chaussures), très fin (76kg), plutôt long (2m06 d'ENVERGURE). Mais il a montré la chose la plus importante pendant les oppositions : qu'il savait jouer au basket, et marquer des paniers. Hyland pourra scorer en NBA, car il domine les jeunes autres prospects avec aisance. Un journaliste sur place (Brett Siegel) rapporte ces propos d'un scout NBA après le premier cinq contre cinq : "Hyland vient de se faire sa place au premier tour de la draft et il n'a pas fini de grimper". Marquer des paniers, on le rappelle, est le but du basketball, Hyland est ainsi bon au basketball.

Jericho Sims (Texas)

Non seulement le monsieur mesure plus de 2m08 avec une envergure de plus de 2m20, mais en plus il affiche la deuxième plus grande détente de tous les candidats ayant passé les tests physiques (tout le monde ne le fait pas), il a aussi été le plus rapide des intérieurs sur le sprint 3/4 de terrain. Jericho Sims est également un nom fort sympathique. Si lui, Greg Brown ET Kai Jones sont draftés ce serait trois intérieurs d'une même équipe, une rareté. Jericho, au-delà du pur physique, est également solide au poste, premier en % de box out de tous les candidats au Combine selon cet excellent article. Capable de plonger au cercle et de défendre 3-4 positions à moindre frais. Le fameux mur de Jericho.

JT Thor (Auburn)

Lui aussi, on en parle depuis quelques semaines. Encore un membre de la classieuse All-Name Team, Thor est avant tout un énorme potentiel de basketball et il l'a prouvé aisément durant ce Combine. D'abord, les mensurateurs ont confirmé qu'il était grand et long comme un jour sans pain. Ensuite, JT a couru très vite et montré sa réactivité (meilleur temps des intérieurs au "Shuttle Run", exercice de rapidité latérale) avant d'enfoncer le clou avec ... sa mécanique de tir très simple, compacte, surtout efficace. Il est encore "vert", un des plus jeunes candidats à la draft, mais le matériau brut ne se refuse pas pour une équipe avec un staff de développement digne de ce nom.

Les chaussures de Marcus Bagley

Tous les prospects gagnent en moyenne un peu plus d'un "pouce" (2,54 cm) entre les mesures "sans chaussures" et "avec chaussures". Mais l'ami Marcus, lui, en gagne quasiment deux (1,75) lorsqu'il enfile ses pompes. On ne sait pas quoi faire de cette info, mais c'est la seule catégorie dans laquelle il s'est vraiment fait remarquer, si ce n'est son ENVERGURE plutôt intéressante (plus de 2m10). C'était gratuit, oui, d'autant que niveau maxi-talonettes, Bagley arrive ex-aecquo avec Roko Prkacin et Isaiah Mobley.

Joe Wieskamp

Le gars Joe est un pur produit du basketball de l'Iowa : on travaille dur, sans trop ouvrir sa bouche, mais on voit très loin. Il a joué chez les "yeux de faucon" pendant son cursus universitaire et lui a clairement le range NBA lorsqu'il shoote. En trois saisons à Iowa, il tourne à 41% de loin, sur plus de six tentatives par match. Shooter, c'est son gagne-pain, il l'a encore fait avec brio au Combine face à une forte opposition athlétique. Car lui aussi l'est, il a surpris tout le monde avec une détente maximale de 1m07. Athlète + shoot + taille (2m01) en chaussures, ça sent le role player que les équipes entre 20 et 30 pourraient regretter de ne pas prendre.

 

Les petits gagnants

 

Yves Pons, nutritionniste

4% de masse graisseuse pour le seul français présent à Chicago. Certes, on a toujours du mal à estimer la fiabilité de cette marque, mais Yves Pons a tout de même la 2e masse grasse la plus basse du plateau, il saute toujours aussi haut - 108 cm de détente maximale - et il a toujours autant de style. Yves Pons n'est pas fait du même matériau que nous autres, pauvres mortels. Même s'il n'est pas drafté, son régime Ponsois devrait séduire ceux à qui les publicités "Comme J'aime" n'ont jamais parlé. En revanche, Yves a eu le droit à quelques remarques positives des observateurs mais n'a peut-être pas assez brillé individuellement pour vraiment marquer les esprits.

Ziaire Williams

Il n'a pas joué en cinq contre cinq mais, comme Tyrell Terry l'année dernière, il a été mesuré quatre à cinq centimètres plus grands que ce qui était sur les tablettes jusqu'alors. 2m04 en chaussettes, 2m07 avec les pompes, il est plus grand que plusieurs prospects présentés comme des postes 4 : JT Thor, Jalen Johnson, Trey Murphy, Jeremiah Robinson-Earl, Greg Brown III, Sam Hauser, pour ne citer qu'eux. Sachant que Ziaire sait déjà shooter et possède un handle correct, il ne reste qu'à muscler le tout pour pouvoir se mettre au niveau physique de la NBA. Rien n'est acquis, mais taille + tir est bien souvent une cominaison qui assure un minimum de carrière dans la grande ligue.

Josh Primo

Une très bonne ENVERGURE pour un arrière (2m06 pour 1m96 en chaussures), une taille correcte et un physique dans l'ensemble satisfaisant. Pour un des plus jeunes prospect de la cuvée, ça aurait pu être suffisant. Sauf que Josh Primo a joué le premier jour des oppositions cinq contre cinq et a montré plus que ce qu'on attendait. Oui, il a rentré ses tirs, mais il s'est aussi occupé par séquences de la création avec le ballon, élément primordial si on considère son potentiel en tant qu'arrière. Il n'a pas joué le deuxième jour des scrimmages, et lui qui hésitait entre un retour à Alabama ou non a choisi de rester dans la draft. Ça signifie que les retours ont été suffisamment positifs pour croire à un first round pick. Notez le nom.

Quentin Grimes

Il s'était raté en 2019 au Combine après une saison freshman pourrie du côté de Kansas. Il est revenu en NCAA, à Houston, il a bossé, il a trouvé un rôle d'abord à la mesure de ce qu'il savait faire (shooter) et a petit à petit pris plus de responsabilités. Sur les deux jours de matchs au NBA Combine, il a impressionné par sa régularité, sa maturité balle en main, choses nouvelles et primordiales quand on est projeté 4,5e option, c'est-à-dire role player. Grimes n'est pas très grand mais il est dense, avec une ENVERGURE correcte (1,96 en chaussures, 95kg 2,03 de wingspan). 

 

Les mitigés

 

Neemias Queta

La plus grande "standing reach" (se tenir debout les bras levés) et la plus grande ENVERGURE du NBA Combine, plus un tir et une mobilité en amélioration. Neemias Queta a d'abord impressionné avant de décevoir, un peu, lors du NBA Combine. Il a montré qu'il pouvait shooter et n'avait pas peur de le faire, ce qui est une bonne chose, mais il doit encore gagner en régularité. Chez nous on pousse très fort pour avoir un joueur portugais en NBA.

Arizona State basketball

Josh Christopher et Marcus Bagley, deux prospects très attendus, arrivaient avec une belle cote au Combine, malgré une saison extrêmement décevante du côté d'Arizona State. Non seulement ils ont été mesurés plus petits que ce qui était attendu, mais en plus ils n'ont pas impressionné dans les "scrimmages", opposition en cinq contre cinq. Bagley a fait un petit match et puis a arrêté, Christopher a scoré, ce qui est sa qualité principale, mais n'a pas vraiment montré de progrès. Dans certains boards, les deux prospects sont au second tour et  même si cela ne devrait pas arriver, pour deux joueurs qui étaient envisagés quasiment dans la lottery avant la saison, on peut affirmer avec certitude que l'expérience d'AZ State avec les tops prospects n'a été concluante ni sur le résultat sportif ni sur la cote des prospects. S'ils glissent, ils peuvent devenir des steals mais les franchises investiront moins sur un pick 25 que sur un pick 10.

Les promesses

Day'Ron Sharpe n'a pas du tout participé au Combine. Le pivot de North Carolina était pourtant inscrit mais a retiré son nom au dernier moment. Retour à l'école ? Pas de post du joueur sur les RS. Promesse de draft alors ? C'est possible, mais aventureux, car le bonhomme n'avait rien d'un top 20 éventuel, même si certains, chez nous, aiment le profil (fort rebondeur, bonnes mains, gros corps mobile). Le deuxième jour, Bones Hyland et Josh Primo imitaient l'ex de UNC. On rappelle donc à bon escient que si tout flatteur vit aux dépends de celui qui l'écoute, les promesses n'engagent que ceux qui les croient. Cette leçon vaut bien un draftage, n'est-ce pas ?

 

Les perdants

 

Brandon Boston Jr.

Peut-être un peu dur de le placer dans les "perdants" mais Boston Jr souffre de la comparaison avec Ziaire Williams (voir plus haut). Ils étaient vus par le même prisme, celui d'ailiers longilignes capable de shooter et, potentiellement, de driver jusqu'au cercle. Sauf que Ziaire est plus grand que John Collins et que Boston a les mensurations de Kevin Huerter (il a de plus longs bras). Forcément, la projection n'est pas la même, bien que Kevin Huerter soit à tous points de vue un joueur fabuleux - et on vous avait prévenu - la taille compte, le poids aussi, malgré des séances de muscu qu'on imagine dense Boston atteint péniblement les 85 kg, soit le poids de Tyler Johnson. Néanmoins, contrairement à beaucoup, on pense toujours qu'il vaut un top 20.

Le Vertec

Chaque année c'est la même histoire, tous les deux ans à minima : un prospect prend son élan, s'avance, saute, et pète en deux le record de détente du NBA Combine. Cette saison, Keon Johnson a complètement défoncé l'outil servant de juge de paix, le Vertec, avec un bond à 1m22 du sol, dix centimètres de plus que tous les autres participants. Keon Johnson est d'ailleurs attendu dans le top 10, même si au-delà de sa verticalité il n'a pas franchement impressionné par sa taille (1m95 en chaussures c'est trop petit pour un ailier), son poids (84kg) et même sa longueur (2m01 d'ENVERGURE). Mais au pire, il pourra toujours aller s'entraîner au fosbury pour aller chercher les 2m45 de Javier Sotomayor, aka "le prince des hauteurs".

Duke

Était-ce un signe, cette saison tout pourlingue de Duke (le mot n'est pas trop fort) ? Un signe de fin de cycle, coach K va s'en aller, à nouveau les prospects vont pouvoir pratiquer un jeu efficace, à défaut d'alléchant. Mais le stratège n'est peut être pas le seul à blâmer tant les pièces dont il disposait semblent avoir du mal à tenir leur "rang". Matthew Hurt et DJ Steward, deux prospects forts en tir mais dont les autres compartiments du jeu posent question, ont été faibles lors des oppositions, et n'ont pas soulevé des "ola" avec leurs mensurations. Le premier est tout grand et tout fin, la comparaison (blagueuse) avec Mister Bean que j'avais faite l'an passé me vient toujours à l'esprit. Le second mesure 1m87 en chaussures. Même s'il se rattrape avec l'envergure, il lui faudra un niveau de "skills" tout autre pour s'imposer en NBA.

La modernité

Chaque année, les tests se ressemblent. Si, selon les observateurs sur place, les "drills" de shoot ont été améliorés cette année, les mensurations physiques et athlétiques restent toujours les mêmes. Par exemple, on se retrouve avec une mesure du taux de masse grasse, qui ne correspond à rien et surtout pas à la réalité. Un taux inférieur ou égal à 5% n'est pas normal et il est même le signe d'une mauvaise santé. Pourtant, 13 joueurs étaient dans ce cas cette année et ont très bien pu se soumettre aux autres tests, qui requièrent une santé optimale (détente, course, etc). Aussi, on fait courir les prospects sur trois quarts de terrain, on les fait bouger entre deux plots. À l'heure où plusieurs centres aux Etats-Unis sont équipés d'appareils mesurant très exactement la puissance d'accélération verticale, horizontale, de décélération, ne serait-il pas l'heure de moderniser tout cela ?